Cette année, il ne m’a pas été donné la chance d’aller pêcher la tête dans les sommets! Ces satanées vertèbres, à force de frotter les unes contre les autres sans amortisseur, finissaient par faire chauffer le moteur et une fois arrivé en haut, j’avais deux solutions: soit y rester… soit sauter en parapente … mais j’ai toujours aimé garder les pieds sur terre! « Niet ».
Alors à partir de juillet, je n’ai eu que le droit de regarder vers le haut en allant puiser quelques souvenirs des « randos » passées!
La pêche en altitude, c’est vraiment le pied. Encore plus que les sorties habituelles « rivières » sur lesquelles on peut sévir le reste de l’année. Chaque échappée belle est une petite expédition. Elle l’est dans la préparation du matériel qui doit être étudié et allégé au maximum pour laisser l’âne à la maison! Et déjà, lorsque l’on prépare ses affaires …on pêche un peu!
Elle est une expédition car les consignes « météo » locales doivent être scrupuleusement prises en considération … un peu comme pour une opération militaire. Même sans être un adepte du treillis et des rangers cirées, les renseignements pris auprès de la sécurité civile donnent un goût de mission délicate … sans jamais devenir impossible!
Même si mes randonnées « pêches » favorites ne se trouvent pas sur le toit du monde, la montagne à vaches sans conscience de ce que l’on fait, peut vite devenir un cauchemar. Moi, je n’aime pas les risques inconsidérés, surtout pour remettre les poissons piqués, en lieu et place d’avant mon arrivée!
Non, de ces sorties, il ne doit y avoir que du plaisir! Certes la « banane » (fruit ou sourire, au choix!) ne se gagne pas facilement et ce n’est qu’au prix de longs efforts effectués pas à pas, au rythme du bâton griffé sur le granit que la soie sortira bruyamment du moulinet pour attaquer, encore plein de sueur et le sac à dos juste posé contre un rhododendron, le gobage rustique d’une fario sur un gros criquet vert poussé par le vent … Ou peut-être attendre patiemment qu’une chasseuse fasse exploser un nuage de vairons sur une bordure.
Mais quel bonheur que de poser la canne contre un bloc, de la troquer pour la technologie numérique et d’immortaliser les Zygènes, les Lichens, les Gentianes et le Lys Martagon.
Assis dans l’herbe grasse en fin de journée, et tourné face à l’enchevêtrement des vallées dominées de ce promontoire, plus je compte les remparts escarpés successifs de teintes dégradées jusqu’à leur fonte complète avec l’horizon, et plus je deviens petit.
Quel simple plaisir aussi que de vivre avec la seule lumière du soleil et de se hâter pour déployer sa tente à temps en ménageant la pile de la frontale, au cas où!
Économiser l’eau, la moindre miette de la barre de céréales, se sentir bien, au simple passage de l’unique tee-shirt propre de secours!
Mettre les chaussettes sales en dehors de la tente comme pour éloigner les mauvais esprits… Chausser le bonnet et s’enfiler dans son duvet en sachant pertinemment que la nuit sera plus froide mais aussi courte que d’habitude avec pour seul compagnon son petit vélo intérieur qui projettera sur le grand écran de la toile de tente, et dans un silence absolu, les courts-métrages de la journée passée et les scénarios du lendemain.
Nb: Pour info et pour exemple, la pêche dans les lacs de montagne a été fermée le 11 octobre cette année en Haute-Savoie.