Je laisse la place à un poème d’Henri MICHAUX (1899-1984) illustré par un cliché « Tête à tête » volé sur un vieil arbre du maquis Corse…
M’éloignant davantage vers l’ouest, je vis des insectes à neuf segments avec des yeux énormes semblables à des râpes et un corsage en treillis comme les lampes des mineurs, d’autres avec des antennes murmurantes; ceux-ci avec une vingtaine de paires de pattes, plus semblables à des agrafes; ceux-là faits de laque noire et de nacre, qui croustillaient sous les pieds comme des coquillages; d’autres hauts sur pattes comme des faucheux avec de petits yeux d’épingle, rouges comme ceux des souris albinos, véritables braises montées sur tiges, ayant une expression d’indicible affolement; d’autres avec une tête d’ivoire, surprenantes calvities dont on se sentait tout à coup si frères, si près, dont les pattes partaient en avant comme des bielles qui zigzaguaient en l’air.
Enfin il y en avait de transparents, carafes qui par endroits seraient poilues; ils avançaient par milliers, faisant une cristallerie, un étalage de lumière et de soleil tel, qu’après cela tout paraissait cendre et produit de nuit noire.