Je suis arrivé à 7h00, pour le premier acte de la journée, sur une bordure que je fréquente assez souvent, j’ai installé un gammare au bout de ma ligne et fait le héron dans les branches. Il s’est écoulé une bonne partie de la matinée avant que je ne croise une première truite de 40 cm en robe noire avec des bandes bien marquées (Elle devait sortir de dessous un bloc) remontant dans peu d’eau. Après un premier passage et apparemment blasée … elle a chassé quelques vairons presque sous mon nez ! Dans la plus grande discrétion et avec célérité, j’ai modifié mon bas de ligne et noué un « zonker Vairon » en patientant jusqu’à son retour ! Quelques instant plus tard, la belle est revenue sur ses terres de chasse, a suivi quelques centimètres mon imitation mais l’a laissée dériver malgré sa nage bien attractive …
Vexé, j’ai décidé de remonter, moi aussi, le long du talus à la recherche d’une partenaire plus conciliante !
Rien. Pas l’ombre d’un poisson sur ce secteur qui, au vu du nombre de blocs, en abrite pourtant quelques-uns ! Sale mois d’Août…
Il m’aura fallu patienter jusqu’à 11h pour enfin deviner une belle forme de 60 cm, le nez dans le léger courant, ondulant magnifiquement à 1m de profondeur. Cette fois-ci, Madame avait une robe plus claire, sur laquelle les zébrures se détachaient sans peine. Celle-ci ne chassait pas les vairons et je n’ai pas osé lui présenter mon streamer, de peur de la faire fuir. Elle attendait certainement des larves en dérives : Changement de bas de ligne et installation d’une larve en coton noir. Deux passages et la truite n’a pas bougé… Ne voulant pas l’énerver, j’ai cessé là et j’ai changé de mouche. J’ai alors opté pour un gammare : Toujours pas de réaction !
Le ciel, très bouché ce matin, ne m’a pas aidé dans ma tâche… J’ai attendu une petite fenêtre propice et décidé de tenter ma chance avec un modèle plus lourd, imitant une larve plate (Celle qui n’est pas encore au catalogue et qui avait fait mouche sur une belle 60, au mois de mai).
Le premier passage fût le bon ! La grosse mémère qui ondulait paisiblement depuis presque 30 minutes, s’est affolée et s’est décalée … Mais par contre le pêcheur, lui, n’a pas été à la hauteur. Ferrage à « re …tar…dem…ent », qui plus est « mou du genou » … la truite a goûté et senti l’os en acier inhabituel dans ce genre de repas … Fâchée, elle a virevolté en recrachant l’intrus et m’a laissé admirer ses mensurations ! Chao !!! Dommage c’était du lourd!
Quand à moi, je me suis assis sur un bloc, j’ai pausé la canne et médité … j’ai rêvé que je pouvais effacer cette partie là de ma vie et revenir quelques minutes en arrière ! Zen.
Après cette matinée de brimades… (C’est très dur pour les nerfs… la pêche à la mouche !), j’ai mangé un quignon de pain en même temps que je rangeais mon matériel (Il n’y a pas que les femmes qui sachent faire plusieurs choses en même temps !) et opté pour un changement de rivière.
Dans l’acte 2 de cette journée, les ombres vont occuper le devant de la scène ! En pleine activité en début d’après-midi, sur un secteur propice, un gros troupeau de Thymallus s’occupaient à cueillir les nymphes en pleine mutation dans la pellicule de l’eau. Le niveau bas du cours d’eau choisi m’a permis de les attaquer d’un angle inhabituel favorisant leur vision dans la colonne d’eau. Quel spectacle que de les voir évoluer dans deux ou trois mètres d’eau et déclencher de fulgurantes ascensions pour venir se saisir des insectes. J’ai passé une bonne heure à les regarder fonctionner avant de les embêter quelque peu. Le flux de la rivière sort d’une longue zone de radier et tombe dans une belle fosse en sautant une petite cascade. L’eau y est brassée à souhait.
Ici, j’ai remarqué que l’organisation de la tribu était bien léchée : Les plus gros étaient calés près du fond en sortie de fosse et ne montaient presque jamais en surface (En tous cas sur cette éclosion !). Les tailles moyennes étaient au contact du tumulte, là ou l’eau est brassée et faisaient exploser la surface frémissante. Les plus modestes, eux étaient à côté du bouillon sur un petit contre courant plus calme.
Côté nourriture… j’ai pu faire quelques tests. Ma belle imitation de Muticus, petit parachute, correspondait parfaitement avec les petits éphémères dérivant à ce moment de l’après midi. Mais cette forme droite sur l’eau, peut-être un peu trop haute ne les a pas fait bouger d’un iota !
Par contre les mouches à flottaison basse comme la mouche à ombre et la fameuse émergente ORL cerclée ont fait bonne figure. Ces deux modèles de petite taille possèdent un peu de brillant. Je me suis amusé à essayer des modèles très voisins et sans « brill » mais sans beaucoup de succès. Même si l’ombre attrape parfois de grosses mouches, le modèle de base reste tout de même une petite imitation, flottant très bas mais flottant tout de même … avec des reflets iridescents. Il se pourrait d’ailleurs que, dans un avenir proche, j’inscrive au catalogue « De plumes et d’acier » une petite imitation scintillante déclinée en plusieurs teintes. A suivre !
Pour l’anecdote, j’ai fait un test avec une ORL un peu âgée. Cette mouche a fait monter régulièrement des ombres (Que je n’ai pas tous piqués d’ailleurs !) et j’ai décidé d’enlever le cerclage… Résultat, plus aucune montée sur ce même modèle amputé ! Si cette expérience n’a rien de scientifique, elle m’a bien amusé et donnera encore un peu plus de sens à mes choix de montages.
Après avoir dérangé ces Thymallus une bonne partie de l’après-midi, j’ai fait le choix de faire le pré-coup du soir sur un secteur voisin plus calme. Une belle brume commençait à envahir le lit de la rivière , pour ce troisième acte et quelques gobages parsemaient la surface laiteuse de manière un peu surnaturelle. J’adore cette ambiance.
Quelques fourmis ont dérivé mais de manière très sporadique. Après avoir ferré une première truite sur une imitation de ce même insecte et raté de nombreuses autres avec le même modèle (…), les truites, de sortie, ont changé petit à petit de cibles et le Muticus avec un petit panache blanc m’a permis de continuer à faire monter quelques poissons mais toujours avec le même défaut de rentabilité ! Décidément je n’aime pas ce terme ! Cette fois, je l’annonce, je change ma soie ! J’ai bien réparé mes Waders mais pour la soie … je sèche!
Bon, une journée un peu longue… La fatigue s’est fait sentir, je crois bien que j’ai un peu gâché le troisième acte! 14 heures de pêche d’affilée … cela commence à peser sur mes vieilles jambes. Dans un avenir proche, il va falloir choisir entre la pratique du matin ou celle du soir. Mais comme pour moi, la pêche, c’est un peu comme la glace au caramel … le choix va être ardu!