J’aime bien tremper mon float tube sur le grand lac du Bouchet en hiver pour taquiner les arcs et les saumons qui lorsque les conditions s’y prêtent se ruent lentement mais de manière appuyée sur les chironomes émergents.
D’habitude à cette période la neige est souvent présente, il fait un froid de canard et je suis souvent seul au monde. Ce qui n’est pas pour me déplaire! Mais cette année, réchauffement climatique oblige, les 13 degrés extérieurs et les 6 degrés dans l’eau ont fait sortir un peu plus de promeneurs … et les poissons aussi d’ailleurs: Quelques gobages saupoudrés de manière assez régulière sur mes cinq ou six heures de pêche.
Lac du Bouchet 11h… Les zones calmes laissent apparaître quelques jolis gobages que je vais tenter en sèche bien entendu: pointe fine et discrétion seront nécessaires…
Leurrer de beaux poissons en sèche à 5 jours de Noël reste pour moi le plus beau des cadeaux! Le vent faible m’a permis de pêcher avec un long bas de ligne de 6m (5 brins de 90 cm en 40/35/30/25 et 17 centièmes) se terminant par 1,50 m de 12 centièmes avec beaucoup de plaisir. Même si j’ai subi une casse retentissante sur une grosse mémère qui s’est piquée, sans que je ferre, et qui a mis un gros coup de tête en guise de protestation, ce fin diamètre, qui plus est dégraissé, est obligatoire pour surprendre nos copines sur les miroirs délaissés par la brise.
Sur l’eau, des chironomes imagos tout frais sortis de l’onde et hauts sur pattes se reposent quelques secondes avant de s’envoler. Dérivant aussi à cette période, des micro-moucherons noirs inimitables à cause de leur petitesse, une ou deux araignées faisant un petit « V » à la surface de l’eau, suspendues à un fil et portées par le vent à l’image des « kite surf » et quelques exemplaires de Chrysopes vert pomme échoués et englués dans la pellicule. Ces insectes fluos sont de magnifiques Neuroptères d’une élégance rare, qui appartiennent au même ordre que les Sialis et que je rencontre souvent sur ce lac en hiver.
Chrysopa Perla est une espèce voisine de Carnea ou Pallens observée sur le lac
Mon imitation de chiro imago habituelle a encore surpris deux belles arcs, un saumon et une demie douzaine de petites truites farios (1/4 de mètre environ!).
Les gobages se sont arrêtés net à 16h30. J’ai donc coupé mon 12 centièmes et noué un zonker blanc sur mon avant pointe en 17 centièmes et passé la dernière demie heure de pêche en rolly-polly . Deux ou trois poissons ont succombé à la nage rapide et attractive de ce modèle et de beaux tocs dans la canne suivis de jolis ratés au ferrage m’ont permis de clôturer la journée avec la banane!
Regardez bien cette image et voyez la nette différence d’écailles au niveau de la ligne latérale: Des petits cœurs!
Sauf que ces petits cœurs là ne lui servent pas à respirer … mais à sentir! Ces petits trous sont autant d’entrées vers les neuromastes situés derrière la peau (Je pense que « Hergé » aurait pu ajouter ce terme à la liste des insultes scandées par le Capitaine Haddock!) et qui sont des organes fantastiques pour sentir les différences de pression du liquide dans lequel le poisson baigne. Composés de gel et de micro-cils, un peu à l’image de notre oreille interne, ces micro-capteurs disposés en ligne sur le pourtour du poisson captent le moindre mouvement du fluide créé par exemple par un autre poisson ou animal, qu’il soit proie ou prédateur.
Grâce à ses capteurs de pression, le poisson a développé un sixième sens. Hyper-sensible aux vibrations, les signaux qu’il détecte sont traités au sein d’une aire spéciale de son cerveau.
Chez certaines espèces, ces neuromastes sont capables de détecter un faible champ électrique émis par une autre espèce et parfois, chez certains requins, je crois, ces petites poches sensibles leurs permettent de sentir des pressions atmosphériques extrêmes annonciatrices de tempêtes par exemple.
Que la Nature est bien faite!
Je ne sais pas comment vous allez aborder la prochaine saison de pêche, mais moi, je vais redoubler de discrétion à chaque pas afin de ne pas leur secouer les neuromastes!